Par Philippe Michel
Mises à jour :
Comment l'état aide Fagorbrandt à rester séduisant pour les repreneurs Le 29/11/2013
Pour se vendre, Brandt doit-il abandonner Fagor ? Le 15/11/2013
En photo : le lave-linge la Française Vedette présenté à la Foire de Paris 2013. A quelques jours du salon Made In France, la chute de FagorBrandt devient un symbole.
Une gestion coopératiste espagnole trop éloignée des réalités du marché et qui a été prise de court par la crise de la consommation et de l’effondrement de son marché intérieur ? Une politique de multi-marques trop peu différenciées, alors que les « nouveaux » entrants (Samsung, LG, Haier, Beko..) misent tout sur un seul et même nom ? Ou tout simplement un positionnement, cœur de gamme, que la distribution n’arrive plus à vendre…On peut chercher toutes les hypothèses mais la réalité est crue. Notre confrère Adrien Cahuzac de l’Usine Nouvelle, a suivi au fil des années l’évolution du groupe et livre une bonne analyse des difficultés qui ne datent pas d’aujourd’hui.Mais ce qui a pris tout le monde de court, et de vitesse c’est le lâchage de Mondragon. FagorBrandt ne pouvait plus résister. Et ce malgré certaines aides, comme celle des banques qui, selon un article bien documenté du Monde, ont annulé la clause obligeant le groupe à garder 30 millions d’euros. "FagorBrandt peut désormais vider ses entrepôts pour fournir ses clients malgré l'arrêt des usines", constate notre confrère.
Une distribution qui gère les annulations
Oui, livrer mais à qui ? Aujourd’hui, la distribution gère comme elle peut les annonces successives sur le groupe FagorBrandt. Et concrètement, cela signifie devoir trouver d’autres produits à des clients qui annulent leur commande d’un produit de la marque Brandt. Et à se demander par quoi remplacer les produits du groupe dans les rayons, en attendant un déstockage massif.Que ce soit pour les magasins ou les centrales d’achat que nous avons eus au téléphone, l’essentiel c’est le consommateur. Et celui-ci est comme la distribution, dans le brouillard. Car en matière de communication, tout était émis depuis l'Espagne. En France, personne n’a pris la parole ces derniers jours, exceptés les syndicats. Et l’on vient de redécouvrir Thierry Léonard, Directeur Général, qui a fait les déclarations d’usage à l’AFP, car un Français vaut mieux qu’un espagnol pour ce type d’annonce.
La solution externe : Haier ou Arcelik ?
Thierry Léonard espère également un délai. Tout comme les salariés du groupe. Un délai qui ne devra pas être trop long, car les rayons, comme la nature, ont horreur du vide. Si sur certaines familles il y a aura un manque, celui-ci sera comblé, comme nous le confie un distributeur : "ils étaient quasiment les seuls sur des segments comme les lave-linge top ou sur des produits en cuisson très bons et bien différenciés. On se demande comment les remplacer, à moins qu’un repreneur n’arrive".Et quel sera ce repreneur ? Quelles seront ses conditions ? Que voudra-t-il ? Les marques ou l’outil industriel ? Les deux ? Et que proposera en échange Arnaud Montebourg ?Un repreneur logique serait Haier. Mais la joint venture en Pologne a été annulée il y a peu. Et pour cause, il n’y a plus d’argent chez l’un des associés. La Chine n’a pas l’agressivité des coréens ni l’opportunisme des européens. Elle est davantage effrayée par ce qui se passe en Europe et attendra que la situation se soit éclaircie avant de faire une offre. Il y a la piste Arcelik, un grand groupe turc dont l’expansion passe par le rachat de marques fortes, comme Grundig. Mais que garder alors que Beko est déjà un concurrent frontal de Brandt et Vedette.Le repreneur prendra son temps, et il aura raison. Car analyser la stratégie dans un marché européen de l’électroménager morose ne peut se faire à la va-vite. D’autant que la concurrence est rude. Ne garder qu’une marque, et conserver l’outil industriel en mettant en avant la qualité des produits serait une solution. Mais surtout, au-delà des machines, l’une des plus grandes richesses de FagorBrandt reste en France le professionnalisme des 1 900 femmes et des hommes qui y travaillent. Et pour voir cela, il faudra davantage une vision d’entrepreneur que d’investisseur…
