Alexandra Bellamy
Dans les allées de l’IFA, nous avons pu entendre çà et là qu’il s’agissait d’un « petit IFA ». Certes, nous n’y avons pas découvert d’innovation « de rupture » mais il faut avouer que cela n’est pas pour nous déplaire. Ce marché très dynamique atteint une certaine maturité et éprouve sans doute le besoin de se stabiliser un peu. L’innovation « de principe » est rarement bénéfique aux utilisateurs, surtout en ce qui concerne des appareils aussi ancrés dans le quotidien que l’électroménager. Il semblerait que les fabricants aient justement pris le temps de se poser et de réfléchir pour revenir à l’essentiel : l’usage concret au quotidien.
L’éveil de la conscience écologique
Suite à l’édition 2018 de l’IFA, nous remarquions que les économies d’énergie n’occupaient plus une place centrale dans la communication des grandes marques. Cette année, les étiquettes estampillées A+++ -50% n’ont pas fait leur retour. Toutefois, nous avons entendu d’autres discours prônant la préservation de la planète dans un sens beaucoup plus large. D’abord, la volonté affichée des fabricants de produire des appareils durables, plus faciles à entretenir et à réparer. Ils sont de plus en plus nombreux à accorder un soin particulier au choix des matériaux employés pour fabriquer leurs appareils et à leur impact écologique.
Certains utilisent même des matériaux recyclés. Hakan Bulgurlu, CEO du groupe turc Arçelik, dont font notamment partie Beko et Grundig, est allé encore plus loin dans cette démarche. Lors d’une conférence, il a appelé les industriels du secteur à se mobiliser pour préserver la planète, en réduisant entre autres leurs déchets plastiques. Il a aussi présenté un lave-linge pourvu d’un filtre retenant les fibres textiles qui finissent dans les océans et les polluent. Le groupe s’est déclaré prêt à partager cette innovation avec les fabricants qui souhaiteraient l’implémenter dans leurs appareils.
Une «premiumisation» généralisée
Après certaines années où le secteur de l’électroménager pouvait paraître boulimique d’innovations, en 2019, il semblait enfin rassasié. Et plutôt tourné vers une autre préoccupation : le premium. Cette montée en gamme, nous l’avons constatée sur tous les stands, dans le choix des matériaux et le travail du design notamment. Tous les fabricants que nous avons rencontrés, sans exception, nous ont déclaré qu’ils travaillaient à devenir « plus premium » - une ambition d’ailleurs fortement revendiquée par les marques chinoises et coréennes. Et cela se ressent sur les produits, quelle que soit la gamme de prix, dès l’entrée de gamme.
C’est simple, chez certains constructeurs, l’évolution est tellement fulgurante en l’espace de deux ou trois éditions de l’IFA qu’on croirait presque avoir affaire à une marque différente. Les produits d’entrée et de milieu de gamme ne viennent tout de même pas flirter avec les marques historiquement haut de gamme, mais tout le marché se trouve « décalé » vers le haut. Ainsi les fabricants historiques premium sont-ils obligés de se réinventer et d’innover pour ne pas se laisser distancer.
Cap sur la conservation des aliments frais
C’est une tendance que nous avions déjà eu l’occasion d’observer lors de l'IFA 2018 et qui se confirme cette année : les fabricants mettent en valeur la consommation d’aliments frais et leur préservation. Quasiment tous ceux qui commercialisent des réfrigérateurs possèdent leur propre système pour conserver plus longtemps les fruits et légumes, qu’il s’agisse d’une gestion précise de la température et du taux d’humidité dans le bac à légumes (le BioFresh de Liebherr par exemple) ou de Leds de couleur qui imitent la lumière naturelle (chez Beko). Non seulement les aliments se conservent plus longtemps, mais leurs vitamines sont également préservées.
Cette tendance accompagne la volonté de plus en plus marquée des consommateurs de cuisiner des plats faits maison, à base d’aliments frais et sains. Mais il n’est pas seulement question de conservation, ces solutions participent aussi à lutter contre le gaspillage alimentaire.
Les appareils proposant la mise sous-vide ont les mêmes missions : conserver et limiter le gaspillage. Ils sont présents sur divers stands de l’IFA, représentés par un réfrigérateur avec système de mise sous-vide en façade déjà découvert l’année dernière (sur le stand de Sharp), un blender fourni avec des boîtes de conservation et une solution de mise sous-vide, un mixeur plongeant qui s’adapte à des sachets de mise sous-vide (Bosch-Siemens) ou des blenders qui mixent sous-vide (chez Beko notamment).
Dans la même lignée, les potagers d’intérieur, qui permettent de consommer des herbes ou de petits fruits et légumes frais, ont toujours autant la cote. Outre certains fabricants spécialisés présents à l’IFA (comme le français Véritable), certains stands y consacrent des espaces entiers (chez BSH par exemple).
La connectivité s’efface sans disparaître pour autant
Lors de l’IFA 2018, la connectivité était incontournable et nous n’avions su échapper à de nombreuses démonstrations d’appareils électroménagers connectés compatibles avec les assistants vocaux. En 2019, il semblerait qu’elle ait cédé sa place d’honneur à des fonctionnalités plus « authentiques ». Les fours, lave-linge et autres réfrigérateurs sont certes nombreux à être connectés, voire compatibles avec les assistants domestiques, mais ces fonctions s’affichent comme des caractéristiques parmi tant d’autres. Elles sont loin d’être autant mises en avant que l’année dernière.
Le discours est recentré sur des fonctions plus concrètes et plus pratiques au quotidien – qui « parlent » peut-être plus aux consommateurs. La conservation des aliments frais en est un bon exemple : avant d’être connectés, les réfrigérateurs promettent de conserver les aliments plus longtemps dans les meilleures conditions. Les fours assurent des résultats de cuisson impeccables et proposent éventuellement des cuissons saines à la vapeur, tandis que les sèche-linge s’affairent avant tout à sécher tous les textiles sans les abîmer.
Et lorsque la connectivité est démontrée, elle est recentrée sur des usages concrets utiles : il n’est plus question de lancer son four ou son lave-linge à distance, fonctions qui ont pu être qualifiées de « gadget ». La connectivité permet plutôt de choisir facilement le programme de lavage idéal (automatiquement grâce à une application chez Candy), de faciliter la gestion des stocks d’aliments dans le réfrigérateur (Electrolux/AEG), de mieux entretenir son électroménager pour qu’il dure ou de cuisiner plus facilement avec les aliments dont on dispose (partenariats d’Electrolux ou de Sharp avec l’application Innit). Enfin, la connectivité facilite aussi un éventuel diagnostic SAV ou permet de faire évoluer les produits via des mises à jour, ce qui les rend là encore plus durables.
Des aspirateurs balais dans tous les coins
S’il y a bien une catégorie d’appareils à laquelle nous ne pouvions échapper lors de ce salon, c’est l’aspirateur balai. Déjà l’année dernière, il en fleurissait un peu sur tous les stands. En 2019, cette tendance se confirme fortement. Alors que les ventes sont florissantes (+47% en valeur en France en 2018 pour les modèles multifonctions, selon les chiffres du Gifam), les fabricants sont de plus en plus nombreux à se jeter dans la mêlée (Miele, par exemple). Quant à ceux qui sont déjà présents sur ce secteur, ils ne cessent de décliner leurs gammes (Electrolux AEG, Hoover, Beko…). Il y a tellement d’aspirateurs balais partout à l’IFA que l’expression « l’embarras du choix » nous vient à l’esprit ; elle prend ici tout son sens.
En matière de design, le noir et le vintage ont la cote
En ce qui concerne le design, quelques tendances émergent de cet IFA 2019. D’abord, le noir mat ou brossé est toujours tendance, notamment dans le domaine du gros électroménager. Réfrigérateurs, fours et hottes se parent de ces coloris et textures élégants et intemporels (chez Samsung, Beko, Amica, Electrolux…).
Outre ces couleurs foncées, certains fabricants misent aussi sur la couleur et même la personnalisation, notamment dans le domaine du froid. Nous avons découvert des concepts de réfrigérateurs à façades personnalisables et interchangeables (Bespoke chez Samsung ou les concepts de façades personnalisées chez Liebherr).
Le petit électroménager, lui, n’hésite pas à jouer la carte du design rétro et des couleurs. Nous avons notamment noté observé cette tendance pour la première fois sur le secteur des purificateurs d’air. Ces appareils jusqu’à présent plutôt austères se sont dévoilés sous un autre jour, tantôt parés d’un style vintage, parfois décorés pour se fondre dans une chambre d’enfant ou même adoptant la forme d’un caisson de basses coloré.