Par Alexandra Bellamy
L’éco-organisme prépare activement l’entrée en vigueur de mesures liées à la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, dès le 1er janvier 2021. Comme évoqué lors de la conférence de presse "Bilan 2019-Perspectives 2020" à l’atelier-boutique la Fabrique Générale à Paris, l'année s'annonce riche...
En 2019, Ecosystem a collecté 604 000 tonnes de déchets d’équipements électriques et électroniques, un chiffre en progression de 5% par rapport à 2018. Une « collecte exceptionnelle » selon les termes de Nathalie Yserd, directrice déléguée. Sur ce plan, Ecosystem se félicite de progresser d’année en année.
Seule la collecte des écrans régresse (-9%)
Parmi les équipements collectés, la majorité sont des appareils électriques et électroniques, au nombre de 80 millions, auxquels s’ajoutent 58 millions de lampes. Les appareils qui ont été collectés en plus grand nombre en 2019 sont les petits appareils ménagers (plus de 70 millions). Seule la collecte des écrans régresse (-9%). La collecte et le recyclage de ces DEE ont permis une économie de 4 millions de tonnes de matières brutes dont des métaux, et d’énergie - 1,6 million de kWh. 492 289 tonnes de CO2 ont également été évitées.
Avec ces chiffres, Ecosystem a atteint ses objectifs de recyclage et de valorisation dans toutes les catégories de produits, sauf les écrans. Cela s’explique notamment par l’interdiction du recyclage du verre des écrans dans tous les pays européens, auparavant exploité pour produire du sable destiné à la fabrication de parpaings.
2020-2021 : le calendrier où tout s’aligne
Christian Brabant, directeur général d’Ecosystem, parle d’un « véritable alignement des planètes » en 2020-2021. « L’adoption de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire crée un véritable alignement entre le moment politique, le moment réglementaire, le moment économique et le moment de l’opinion » précise-t-il, ajoutant que « la bascule radicale de l’opinion provoque une accélération du besoin de changement ».
L’arrivée de la loi anti-gaspillage, qualifiée d’ambitieuse, coïncide en effet avec une prise de conscience des consommateurs. Ils sont de plus en plus nombreux à se préoccuper de questions environnementales, à souhaiter réparer leurs appareils et avoir accès à des produits reconditionnés. Le 1er janvier 2021 est également la date de réagrément d’Ecosystem.
Le mission de l'éco-organisme s’élargit à la réparation
2020 et 2021 sont des années charnières à plus d’un titre pour Ecosystem. L’éco-organisme va en effet élargir sa participation à l’allongement de la durée de vie des produits. Il organise déjà la collecte, le recyclage et le rémploi des DEEE. « Nous sommes le chef d’orchestre d’une multitude d’acteurs privés, publics, associatifs » explique Christian Brabant. Un rôle qui va s’étendre à la réparation, largement encouragée par la loi anti-gaspillage.
La création de fonds dédiés au réemploi et à la réparation
La loi anti-gaspillage va impliquer de nombreux changements pour la filière. Ecosystem doit l’accompagner dans ces évolutions, d’un point de vue technique, opérationnel et financier. Concrètement, l’éco-organisme doit notamment créer et piloter des fonds dédiés au réemploi et à la réparation. Ecosystem bénéficie déjà d’une expérience en matière de réemploi, versant notamment des aides (à hauteur de 7 millions d’euros en 2019) à 260 acteurs du réemploi comme Emmaüs ou les Restos du Cœur.
En revanche, concernant le fonds réparation, qui verra le jour début 2021, tout est à créer. La loi prévoit d’obliger les fabricants et éco-organismes à participer au financement de la réparation. La part financée, de même que la méthode de financement ne sont pas encore définis. Ni même les produits qui seront concernés, même s’il est probable que cela s’applique dans un premier temps aux appareils pour lesquels se prépare un indice de réparabilité (à savoir lave-linge, TV, téléphone portable et ordinateur).
Ecosystem explore actuellement plusieurs pistes concernant le financement comme la possibilité de réorienter une partie de l’éco-contribution (si la réparation est encouragée, collecte et recyclage devraient diminuer) ou encore un financement directement via les réparateurs. Toutes ces questions seront définies par des décrets, sachant qu’une centaine doivent encore voir le jour sur ces questions.
Ecosystem relève également certaines difficultés ou points d’attention : l’éco-organisme devra veiller à ce que ce fonds soit utilisé de manière pertinente et ne serve pas à indemniser la réparation d’appareils encore sous garantie. Une question d’autant plus complexe qu’en France, il existe des garanties de diverses natures (légale, contractuelle, extension de garantie, prise en charge par les assurances responsabilité civile…) et de durées variables.
L'élaboration d’un annuaire des réparateurs
Le rôle endossé par Ecosystem ne se limite pas au pilotage d’un fonds dédié. Il est nécessaire de lever certains obstacles qui freinent les consommateurs et ceux-ci ne concernent pas seulement le coût de la réparation. Faire réparer doit également être pratique.
Ecosystem développe actuellement un annuaire des réparateurs, dont la démonstration a été faite lors de la conférence de presse. Il devrait être accessible au public d’ici la fin du premier semestre 2021. Cette base de données se veut la plus complète possible, fournissant des informations pratiques comme le type d’appareil pris en charge par chaque réaparateur, la présence d’un parking, les horaires d’ouverture… ainsi qu’une fonction de géolocalisation.
Ecosystem précise qu’il ne s’agit pas de réparateurs recommandés mais labellisés, qui répondent donc à un certain nombre de critères vérifiés (responsabilité civile professionnelle, inscription aux registres, habilitation électrique, politique RGPD…).
Réemploi : déjà 7 000 emplois en France
Depuis 2006, Ecosystem favorise le réemploi. Cette activité génère 7 000 emplois en France, dont un sur deux dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. L’éco-organisme met à disposition des acteurs du réemploi un important flux de DEEE – les appareils proviennent du réseau national de déchetteries ou de reprises d’anciens appareils lors de livraisons. En 2019, parmi les 80 millions d’appareils électriques et électroniques collectés, 574 263 ont d’ailleurs été réemployés.
Si cela concerne beaucoup les appareils électroménagers, Ecosystem se préoccupe également de plus petits produits comme les téléphones mobiles, qui représentent un important gisement (50 à 100 millions de téléphones dormiraient dans les tiroirs selon Ecosystem). Aussi, l’année dernière, l’éco-organisme a-t-il ouvert le site dédié jedonnemontelephone.fr. Les consommateurs qui souhaitent se délester d’un ancien téléphone qui n’a plus de valeur marchande ou parce qu’ils privilégient le don à la revente, peuvent y céder leur appareil, sans frais d’envoi. Les Ateliers du Bocage assure la remise en état, après avoir suivi un protocole strict d’effacement des données personnelles.
Elargir le réemploi aux pièces détachées
La loi anti-gaspillage prévoit également de développer l’utilisation de pièces détachées issues de l’économie circulaire. Cette évolution interviendra le 1er janvier 2022, un an après l’apparition de l’indice de réparabilité et du fonds réparation (1er janvier 2021).
Pour approvisionner les réparateurs en pièces détachées d’occasion, une plateforme nationale doit voir le jour en 2022. Ecosystem précise qu’un pilote cofinancé par l’Ademe a été développé il y a deux ans, pour déterminer quelles sont les pièces les plus demandées par les réseaux de réparateurs.
Actuellement, il existe déjà une base de données baptisée Agora, qui agrège les pièces neuves d’origine. Interrogé sur la possible intégration de pièces d’occasion à la plateforme existante Agora, Ecosystem explique ne pas savoir comment la plateforme va s’organiser ; là encore, des travaux et décrets sont en cours d’élaboration.
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