Pourquoi Electro Dépôt veut faire pivoter le low-cost face à la transition écologique ?
Anticiper plutôt que subir et rater le virage... C'est la stratégie choisie par Electro Dépôt face à la transition écologique et sociétale aujourd'hui à l'oeuvre. D’ici 2030, le distributeur low-cost, entend réduire de 40% l’empreinte carbone des produits liés à ses MDD. Pour Stéphane Belot, Directeur de la Transition Ecologique & Sociétale chez Electro Depôt Group, "la performance environnementale des produits va devenir un élément de choix au même titre que le design, la fiabilité et le prix". Il nous explique comment le "Decathlon de l’électroménager et du multimédia" s'y prépare d'ores et déjà.
Neomag. Depuis début 2020, vous avez pris la direction de la transition écologique et sociétale, un nouveau poste créé au sein du groupe Electro Dépôt. Quels sont les enjeux pour l’entreprise ?
Stéphane Belot. Depuis 14 ans chez Electro Dépôt j’ai occupé différentes fonctions essentiellement aux achats et au marketing. Depuis février 2020, j’occupe en effet un nouveau poste créé par Electro Dépôt, celui de directeur de la transition écologique et sociétale au côté du directeur général du groupe. Ma mission : mettre en œuvre tout le plan stratégique de transformation de la société afin faire pivoter l’entreprise sur un modèle respectant mieux l’environnement et qui contribue à la lutte contre le réchauffement climatique notamment.
Quels sont les moyens affectés par Electro Dépot pour mettre en œuvre ce plan ?
Nous disposons d’une structure ultra courte car dans les faits, nous considérons que la transition écologique et sociétale est l’affaire de tous les services. Lors de la convention qui réunissait tous les cadres au mois de février, j’ai ainsi expliqué que les 1 783 collaborateurs du groupe participaient à ce plan. Chaque entité va, en effet, prendre en compte cette transformation. Des achats à la logistique en passant par les magasins, la communication, etc…
Déjà, avant le déclenchement de la crise sanitaire, Electro Dépôt avait annoncé son objectif de réduire de 40% l’empreinte carbone des produits liés à ses marques propres d’ici 2030. Avec ce qui s’est passé depuis, cela prend tout son sens…
Tout à fait. C’est aujourd’hui le rôle citoyen d’une entreprise de lutter contre le réchauffement climatique. Et nos plus jeunes collaborateurs ne manquent pas de nous le rappeler au quotidien d’ailleurs. C’est donc un devoir d’être conscient de son impact carbone mais aussi de tout le chemin qu’il reste à parcourir pour le réduire.
Outre le devoir citoyen, il s’agit aussi d’un vouloir commercial afin de répondre aux demandes des consommateurs qui exigent de plus en plus de la part des entreprises, fabricants ou distributeurs, d’être irréprochable sur ce sujet.
La transition écologique a la même ampleur pour nous que la transition digitale il y a une quinzaine d’années qui a impacté les entreprises comme les consommateurs. Beaucoup de sociétés n’ont alors pas pris suffisamment à temps le virage du digital. Nous-mêmes avons dû rattraper ce retard. Nous n’allons donc pas commettre la même erreur et nous prenons aujourd’hui le virage de la transition écologique afin d’anticiper les nouvelles voies à venir mais aussi les contraintes réglementaires plutôt que de les subir.
Quels sont les chantiers prioritaires sur votre feuille de route ?
Nous avons eu en juillet, les résultats du premier bilan carbone lancé dans l’entreprise, réalisé avec le cabinet EcoAct. Il nous a permis d’avoir une base certifiée, sérieuse et chiffrée de notre empreinte carbone. A cet égard, Les produits que nous vendons constituent la majeure partie de notre impact carbone. Cela concerne d’une part, la fabrication des produits mais aussi l’usage de ces derniers par le consommateur, que ce soit pour un téléviseur, un ordinateur ou un lave-linge. Les plans d’actions vont donc porter avant tout sur tout ce qui tourne autour des produits, de la fabrication jusqu’à la réparation. A cet égard, Electro Dépôt a pour particularité d’être un acteur important en matière de marques de distributeur. Certains nous appellent même le Decathlon de l’électroménager et du multimédia... Nos produits en marque propre représentent une part majeure de notre activité sur certaines lignes de produits. Une équipe d’une quarantaine de personnes travaille sur notre offre MDD. Nous avons donc un levier d’action formidable pour travailler sur l’écoconception de nos MDD, l’approvisionnement, le cycle de vie, et la réparabilité. Ce sont autant de gros chantiers que nous menons et nous formons à cet égard toutes nos équipes à l’écoconception tandis que nous nous engageons aussi sur un approvisionnement plus durable.
Concrètement, quelles sont les implications de ce virage en termes de sourcing ?
Historiquement, nous avons déjà diversifié notre sourcing pour éviter la dépendance à la Chine nous avions déjà un certain nombre de fournisseurs dans certains pays de l’Europe de l’Est, l’Italie, le Portugal ainsi qu’en Turquie.
La performance environnementale des produits deviendra un élément de choix au même titre que le design, la fiabilité et le prix bien entendu. Les usines elles-mêmes sont confrontées à une pression de leur pays et de leurs différents clients. Elles ont tout intérêt elles-mêmes à prendre ce virage afin de conserver leurs parts de marché. Tout concourt donc à prendre le virage de cette transition. Il ne faut pas lutter contre le sens du vent mais au contraire, le transformer en levier pour gagner.
Revenons sur votre partenariat avec Spareka sur la réparabilité. Concrètement comment cela s’est-il mis en place ?
Ils sont venus vers nous et très rapidement, nous avons été convaincus de l’intérêt d’une collaboration. Ceci pour deux raisons. La première concerne l’allongement de la durée de vie des produits, ce qui contribue à réduire notre impact du CO2. La seconde représente un avantage commercial.
Je m’explique… Aux yeux de certains consommateurs, la réparation, par exemple, d’un lave-linge à 250 euros exigerait une centaine d’euros de réparations après garantie. Pour certains consommateurs, il y a donc la tentation de ne pas réparer et donc de jeter. Pour d’autres, il pourra y avoir l’idée de privilégier une machine plus chère, avec la croyance qu’elle sera moins susceptible de tomber en panne. Ce que nous pensons chez Electro Dépôt, c’est que, plutôt que de proposer des tarifs plus élevés, mieux vaut proposer une machine de qualité à 250 euros qui soit réparable en disposant de pièces de rechange. C’est donc un vrai argument de vente qui plus est pour nous, fortement positionnés sur des produits en entrée et moyen de gamme. Nous disons donc à nos clients : « N’hésitez pas acquérir des machines de qualité moins onéreuses et que vous pourrez réparer facilement par vous-même ! ».
Pensez-vous que les clients, prêts à l’autoréparation soient nombreux aujourd’hui ? Même si le sujet est dans l’air du temps et qu’il est de plus en plus médiatisé, tout le monde n’a pas forcément cette envie…
L’autoréparation ne concerne en effet pas forcément tout le monde ni tous les cas de panne. Mais selon le principe du colibri, ce serait déjà bien si nous répondons à la demande de quelques centaines, puis quelques milliers de clients à même de réparer par eux-mêmes leur machine en mettant à leur disposition des pièces de rechange. Dans tous les cas, nous avons une réponse adaptée à chaque typologie de client.
Et pour les clients qui souhaitent faire malgré tout réparer par des techniciens ?
En matière de SAV, nous n’avons pas de service après-vente en interne mais nous travaillons avec des prestataires tels les SAV d’Auchan, de Solvarea (Groupe Boulanger) et aussi avec des réparateurs indépendants selon la localisation géographique du magasin.